Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/28

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grand Monarque avoit donné ordre à son grand veneur en fait d’amour, de faire tous ses efforts pour faire tomber sa femme dans ses toiles. Enfin il ignoroit, ce bon seigneur, qu’on travailloit à arborer sur sa tête les armes de ces animaux connus, dont la chasse devoit faire le plaisir du Roi.

Le jour venu pour cette double chasse, le comte de L… ne manqua pas de se rendre en diligence auprès du Roi ; et le duc de La Feuillade n’eut garde de manquer à se trouver au lieu de l’assignation[1], où se devoit trouver cette belle compagnie. Je ne décrirai ni la magnificence de cette fête, ni ce qui se passa dans la chasse du Roi ; je ne puis pourtant passer sous silence une particularité qui me semble remarquable, et qui étoit d’un mauvais préjugé pour ce prince, dans le dessein de cette journée. C’est qu’ayant tiré deux fois sur un sanglier, il le manqua, et ne lui fit aucun mal ; et le comte de L… ayant tiré après lui, le blessa du premier coup. Quoique le Roi ne soit pas superstitieux, cela n’empêcha pas qu’il n’eût du chagrin de cette aventure ; cela ne lui étoit jamais arrivé, car il est fort adroit à toutes sortes d’exercices, et particulièrement à la chasse ; mais ce qui augmentoit son chagrin, c’est que le comte de L… venoit de frapper du premier coup la bête, qu’il avoit manquée jusques à deux fois ; mais que cela lui fût arrivé précisément le même jour, et peut-être à la même heure que le duc de La Feuillade parloit de sa passion à la comtesse,

  1. Rendez-vous.