Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/152

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ardeur qui s’appelait Laviron, ne reste-t-il plus rien ? — Rien que des os blanchis, recouverts à la hâte de quelques poignées de terre, et foulés chaque jour sous les pieds d’insolents vainqueurs. Quoi ! tandis que les vers se glissent à l’aise dans les anfractuosités de ce crâne vide, tandis que le gazon verdit sur ce monceau d’argile, tandis que la vie de la matière renaît de la mort de la matière, la vie de l’âme ne reproduirait que le néant !

Non, cela n’est pas. Abîmes de ma raison, mugissez, et que jamais la maigre voix de la foi ne domine vos grandes revendications…

Rien n’est perdu dans le grand atelier de la nature. La vie ne se tire pas du néant, non plus que les corps du vide ; les âmes humaines ne se forment point par la compression de je ne sais quelle légère vapeur, remplie par un esprit plus impalpable, plus stérile encore, qu’on appelle le souffle de Dieu.

Le corps d’un homme renaît dans chaque être de l’univers ; et je puis suivre cette transformation matérielle. L’âme de l’homme renaît donc aussi, non pas pour s’enivrer de cantiques, de liqueurs fermentées et de houris idéales, comme on nous la représente dans tous les paradis mystiques, mais pour animer de nouveaux corps d’hommes, pour être utilisée sous la forme où elle peut le mieux servir.

Toutes les religions et tous les matérialismes du monde ne réussiront pas à arracher de mon intelligence cette notion si simple que je dois à