Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/239

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Cet homme sort ; il va revêtir un costume élégant ; puis, traversant à pas pressés un dédale de rues sombres, il s’arrête à la porte d’un hôtel où sont suspendues les armes de France. L’ambassade lui est ouverte à toute heure. Là, il raconte qu’il a réussi à s’introduire dans les conciliabules des réfugiés, qu’il les a vus menant vie joyeuse, pariant, jouant, jurant et se vautrant dans l’orgie, comme pourraient le faire les très honorables employés du gouvernement. Ces irréconciliables ennemis de l’ordre juraient sur des poignards et s’enivraient du bruit de leurs vaines menaces. Il les a entendus décréter la mort de l’Empereur et la proclamation de la République rouge. Il a appris qu’on construisait à Marseille une machine infernale. Les réfugiés de Suisse bivouaquent dans les gorges du Jura ; ceux de l’Espagne se tiennent prêts à franchir la Bidassoa, avec une armée de contrebandiers. Les sociétés de Londres, reliées à celles de Bruxelles et de Jersey, se sont mises à la tête de ce mouvement concerté ; elles doivent constituer un gouvernement provisoire à Boulogne, où elles tenteront une descente prochaine avec les fonds de l’emprunt italien. Tous les rapports des mouchards sont les mêmes. Ce n’est pas ma faute si les gouvernements croient nécessaire d’entretenir tous ces meurt-de-faim. Je répète ce qu’ils disent.

127 Tous les mouchards se ressemblent, tous fréquentent les cafés français à l’étranger. Ils montent leur faction à l’arrivée et au départ des voitures publiques ; ils paraissent dans tous les rassemble-