Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/445

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que ; sa voix est connue dans les assemblées de la nation. Elle rayonne sur le pays comme le jeune soleil.

Au contraire, la société de Zofingen dépérit. Comme les vieillards, elle vit dans les âges passés ; elle radote. Sa casquette blanche a déteint sur ses cheveux d’enfant. Les familles aristocratiques dont ses membres sont issus, ne sont pas assez nombreuses pour faire foule sur leur passage ; elles n’ont pas assez d’influence sur les masses pour se concilier la considération.

Les malheureux jeunes gens ! Ils ont vingt ans, seize ans, et ils se condamnent à la mort des vieillards ; écrasés sous le poids d’une morgue héréditaire, sans horizon, dans la longue nuit d’une tradition stérile. Laissez donc finir ainsi vos parents ; de vieux diplomates, de vieux pasteurs, de vieux mercenaires de l’étranger, de vieux prêteurs sur gage, de vieux pédagogues qui ont décrassé les gentilshommes d’Angleterre et de Russie, et qui n’ont rapporté dans leur pays que leurs vieux os. Vous n’êtes pas encore bons à faire des morts, et il n’est pas d’agonie plus navrante que celle des roses enfants qu’atteint le croup !

Et vous, étudiants de l’Helvétia, ne consumez pas vos brillantes années à détruire pièce à pièce une société mourante. En vous séparant d’elle, vous l’avez privée de sa clef de voûte et de ses assises ; elle s’écroulera bientôt. Laissez le temps faire son travail ; laissez-les vivre sur leurs six mille ans de traditions, et sur leurs seules gloires