Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/308

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prélève sur eux l’escompte de leurs infirmités. De sorte qu’il peut faire le calcul des bénéfices que lui rapporte la dénaturation de ses semblables ; de sorte qu’il la produit, l’entretient à dessein et ne s’en cache pas ! — Nous trouvons barbares les Chinois qui brisent le pied de leurs femmes pour les rendre plus jolies et plus fidèles, tandis qu’il nous semble très simple que les Européens mutilent les travailleurs pour leur ôter toute force et tout courage. En vérité, nous sommes des cannibales très comme il faut !


Il y a tant de cupidité dans ce pays que le patron renvoie sans pitié le plus habile, le plus assidu, le plus ancien de ses ouvriers, dès qu’il en trouve un autre qui puisse faire à peu près aussi bien pour un prix inférieur. — L’homme ne s’attache plus à l’homme que comme le tigre à la gazelle, pour le dévorer !

Il y a tant de misère, dans ce pays que le travailleur est obligé de subir toutes les conditions de son maître, de lui faire crédit plusieurs semaines, de passer les fêtes et les nuits au même prix que les jours, de gagner des médailles d’or pour un morceau de pain ! — Le capital achète tout, revend tout, corrompt tout. Le civilisé, c’est l’homme au masque d’argent !


Il y a tant de misère dans ce pays que le maigre salaire de l’ouvrier doit encore suffire pour sa famille, et qu’il lui faut entretenir 464 souvent six