Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/464

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Ils en ont tué beaucoup ; chaque commissaire de police en a son plein carnier. Ils remplissent leurs cachots d’hommes, comme les bourgeois remplissent leurs gardes-mangers de menue venaison. La gangrène se met dans les blessures d’un grand nombre ; beaucoup meurent étouffés ; les autres se disputent des fèves, des lentilles, des perruques de magistrat et des semelles de militaire, dans les gamelles impériales. Entre temps la chasse rentre aux Tuileries pour faire ripaille.

Tayaut ! Tayaut ! L’Empereur chasse.

Tout regorge : basses fosses, casemates et pontons. Les navires aux flammes tricolores emportent le surplus sous les climats tropicaux, dans les déserts brûlants et les îles perdues. Ceux-là sont le butin de la mort. Jamais ils ne reverront les doux rivages de la patrie que plusieurs aiment encore. Faute de bras pour les cultiver, beaucoup de champs fertiles porteront des chardons, et dans bien des villages, les femmes et les enfants conduiront la charrue lourde en pleurant le père de famille.

Tayaut ! Tayaut ! L’Empereur chasse.

Ce n’est pas tout. Quelques-uns se seront échappés du massacre général ; plus heureux que les autres, ils auront trouvé refuge dans les pays voisins. Pauvre asile ! presque autant vaudrait la prison. Car ils seront numérotés, gardés et traqués comme 563 gibier de réserve. L’Europe occidentale est la faisanderie de sa M. I. Bruxelles, Berne et Turin tremblent en saluant les employés de la rue de Jérusalem. Les gouvernants des états limitro-