Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/83

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Avant tout, dirais-je à l’homme, délivre-toi du mal ! Et quand toutes les heures de ta vie sont la proie du mal, eh bien ! délivre-toi de la vie !

Si tu as désespéré de toutes choses, si tu appelles la Mort comme une fiancée : tue-toi !

Si les beaux Séraphins aux ailes flamboyantes soulèvent toutes les nuits ta tête vers les cieux : tue-toi !

Si tu vois les morts qui t’aiment danser à l’heure de minuit sur le gazon des tombes, s’ils te réservent une place dans leurs rondes joyeuses : tue-toi !

Si ta mère vénérée, si la bien-aimée de ton cœur te sourient dans de plus beaux mondes : tue-toi !

Si, plus grande que sur cette terre maudite, la Gloire t’apparaît dans l’avenir : tue-toi !

Si tu ne peux atteindre l’amour de tes rêves, l’étincelant rayon de ton espoir, la dernière aspiration de ta pensée : tue-toi !

Si le cor des révolutions, si le canon hurleur qui sonne les batailles retentissent en ton âme : tue-toi !

320 Malheureux si tu n’en as pas la force ! Heureux si tu peux exécuter la résolution suprême !

— L’homme est trop petit en réalité, trop grand en espérance pour redouter la mort. Avec un peu de courage il peut rompre en une seconde les lourdes chaînes du présent. De sang-froid, il ne doit pas être bien affreux de mourir en se précipitant, en s’endormant dans les vapeurs du char-