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xiv
ANALYSE DE LA CRITIQUE


phénomène en chose en soi, à regarder, par exemple, l'étendue en soi comme une substance ou comme une propriété réelle des objets. — On trouvera sans doute bien subtile cette explication de Kant. Dire que les choses ne nous apparaissent comme juxtaposées ou comme successives qu'en vertu de notre manière de les percevoir, mais qu'elles ne sont pas réellement ainsi, qu'elles ne seraient pas ainsi, par exemple, an regard d'un être tel que Dieu, pour qui il n'y aurait, suivant l'idée des théologiens, ni passé, ni futur, mais un éternel présent ; et prétendre en même temps que tout en les percevant ainsi, nous ne sommes pas les jouets d'une illusion, parce que les choses nous sont réellement données, c'est là une pure subtilité. Mais je ne discute pas en ce moment la pensée de Kant, je ne fais que l'exposer ; j ai voulu seulement indiquer tout de suite une réflexion qui se présente ici d'elle-même à l'esprit. Une autre conclusion importante, à laquelle conduit l'esthétique transcendentale, c'est que, en nous montrant dans ces intuitions pures ou à priori (l'espace et le temps) que nous fournit la sensibilité, une des conditions qui nous expliquent comment sont possibles des propositions synthétiques à priori, c'est-à-dire des propositions que ne pourraient engendrer de simples concepts, cette théorie nous avertit aussi que les jugements que nous formons par ce moyen (en liant synthétiquement nos concepts à ces intuitions) ne sauraient s'appliquer qu'aux objets des sens et n'ont de valeur que relativement aux choses d'expérience possible (v. p. 109). Cette conclusion qui surgit ici n'est encore qu'indiquée ; mais nous la retrouverons en quelque sorte à tous les pas de la critique de la raison pure, dont nous n'avons encore franchi que le premier.

Arrivons maintenant au second.

Logique transcendentale.

La Sensibilité, dont l'esthétique transcendentale vient de déterminer les formes à priori, ne suffit pas pour constituer la connaissance. Par elle les objets nous sont donnés au moyen des représentations ou des intuitions qu'elle nous fournit ; mais, pour qu'il y ait connaissance, il faut que ces objets soient pensés au moyen de certains concepts qui viennent de l'entendement.

L'action de l'entendement.


Sans la première de ces facultés, rien ne nous serait donné ; mais sans la seconde, rien ne serait pensé. Sans l'entendement, les intuitions de la sensibilité seraient aveugles, de même que, sans la sensibilité, les concepts de l'entendement seraient vides. Il