Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/372

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Toute sa vie, il fut malade, d’un mal dont nous avons vu le retentissement sur l’intelligence et sur la volonté. Mais son génie vient-il de sa maladie ? En est-il la résultante directe ? Il est incontestable qu’il y a de son mal dans son art, si son art ne vient pas exclusivement de son mal. Il est non moins indéniable que non seulement le mal sacré n’a point tué l’art chez celui qui en fut affecté, mais que l’artiste s’en est aidé pour étendre les limites de son art.

« L’esprit souffle où il veut » ; c’est le miracle de l’esprit qu’il puisse tirer profit de la maladie même : par esprit, on doit entendre le souffle, l’inspiration géniale. L’étonnant, dans le cas de Dostoïevsky, c’est que l’épilepsie, loin de porter obstacle à ses travaux littéraires, ait été un adjuvant précieux pour son talent.

S’il lui avait été donné de s’en expliquer, il eût, à coup sûr, contresigné cette déclaration de Nietzche : « Quant à ma maladie, je lui dois indubitablement plus qu’à ma santé. Je lui dois la santé supérieure, qui fortifie l’homme au moyen de tout ce qui ne le tue pas. Je lui dois toute ma philosophie. La grande souffrance seule est le suprême libérateur de l’esprit. »

Que l’écrivain russe ait tenu de son père, médecin, l’intuition qui lui a fait devancer, sur le terrain