Page:Cabanis - Rapports du physique et du moral de l’homme, 1805, tome 1.djvu/447

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tendoient de plus en plus à river pour toujours les fers des nations.

Non, l’amour, tel que le développe la nature, n’est pas ce torrent effréné qui renverse tout : ce n’est point ce fantôme théâtral qui se nourrit de ses propres éclats, se complaît dans une vaine représentation, et s’enivre lui-même des effets qu’il produit sur les spectateurs. C’est encore moins cette froide galanterie qui se joue d’elle-même et de son objet, dénature, par une expression recherchée, les sentimens tendres et délicats, et n’a pas même la prétention de tromper la personne à laquelle ils s’adressent ; ou cette métaphysique subtile qui, née de l’impuissance du cœur et de l’imagination, a trouvé le moyen de rendre fastidieux les intérêts les plus chers aux âmes véritablement sensibles. Non, ce n’est rien de tout cela. Les anciens, sortis à peine de l’enfance sociale, avoient, ce semble, bien mieux senti ce que doit être, ce qu’est véritablement cette passion, ou ce penchant impérieux, dans un état de choses naturel : ils l’avoient peint dans des tableaux, à la vérité défigurés encore par les travers et les désordres que toléroient les mœurs du temps,