Page:Cahiers de la Quinzaine, 14e série, n°5-8, 1913.djvu/202

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l’argent


hommes, innocents et fâcheusement enthousiastes, candides, aveugles, si naïvement pieux envers leurs maîtres, que leurs maîtres ont trompés. Nous sommes ces enfants d’avant douze ans, ces mêmes enfants, aussi purs, peut-être plus purs ; et nous sommes ces mêmes adolescents d’avant seize ans. Nous sommes les hommes de notre laborieuse enfance. Nous sommes les hommes de notre laborieuse adolescence. Nous ne sommes nullement les hommes de notre jeunesse abusée. C’est dire par contre que nous avons subi l’imprégnation de nos parents ; et de nos maîtres du premier degré ; et de nos maîtres du deuxième degré. Mais que nous n’avons subi aucune imprégnation de nos maîtres du troisième degré. D’ailleurs nos maîtres du troisième degré se souciaient bien de filiation et de paternité spirituelle et de régner sur les cœurs. Leur seul souci était par un jeu de mariages, de nominations, d’élections académiques et universitaires, d’intrigues, de bassesses, de trahisons, de délations et d’honneurs, de s’assurer, de perpétuer parmi eux un gouvernement temporel des esprits. Ils ont ce qu’ils voulaient. Et au delà de ce qu’ils espéraient. Qu’ils ne demandent pas au delà.

C’est dire par conséquent que le plus beau métier du monde, après le métier de parent, (et d’ailleurs c’est le métier le plus apparenté au métier de parent), c’est le métier de maître d’école et c’est le métier de professeur de lycée. Ou si vous préférez c’est le métier d’instituteur et c’est le métier de professeur de l’enseignement secondaire. Mais alors que les instituteurs se contentent donc de ce qu’il y a de plus beau. Et qu’ils ne cherchent point à leur tour à expliquer, à inventer, à exercer un

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