Page:Cahiers de la Quinzaine - Série 15, cahiers 4-6, 1914.djvu/432

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Ici, le cœur n’est jamais tout à fait la victime de l’esprit, ni son tyran. Ici, l’esprit n’est jamais tout à fait le jouet du cœur. Dans les ténèbres les plus noires, dans le plus rouge égarement des passions, une lueur veille : le fond clair de l’intelligence. Et sur les ruines les plus funestes de la pensée, dans les plus cruels décombres de l’analyse, le cœur demeure vif, capable de jeu, capable de plaisir, capable d’espoir passionné.

La conscience est le fond de cette étrange poésie, que les autres peuples ont eu tant de peine à entendre ; tôt ou tard, ils y viendront pourtant. La conscience, et comme il sied à des hommes, la conscience qui se torture : le débat du corps et du cœur, comme dit Villon ; et l’esprit jugeant, tantôt en juge cruel qui raille, tantôt en père pitoyable : c’est la grande poésie de France, unique au monde par la vertu pensante, jusque dans l’abandon