leau sur les femmes, et il est, avec Molière, contre les Femmes savantes : ici encore donc fidèle à la pure tradition classique et française, et si opposé à toute la tradition pseudo-révolutionnaire qu’un homme, comme Barbey d’Aurevilly, lui tirera son chapeau et l’appellera, magnifiquement, un « rude casseur de pierres ». Il n’est pas unitaire, ni étatiste, ni centralisateur, ni jacobin ; il fut, au risque de passer pour papiste, contre l’unité italienne ; il est fédéraliste, régionaliste, au point de défendre — horresco referens — le scrutin d’arrondissement, et toute son œuvre est la plus magnifique démolition qu’on puisse rêver de la démocratie une et indivisible et du dogme unitaire. Il n’est pas pacifiste : au grand scandale de tous les démocrates, il fait de la guerre le panégyrique le plus superbe qu’on ait jamais fait et il voit dans le guerrier un homme plus grand que nature et dans la guerre « la manifestation qui nous honore le plus devant l’Éternel ». Il n’est pas optimiste ni panthéiste : le monde, selon lui, repose sur des antagonismes irréductibles et la lutte éternelle des forces ; il n’est pas, il ne sera jamais « une ronde de parfait amour » ; la guerre est universelle, et de cette guerre résulta l’équilibre : il n’y a pas d’harmonie préétablie. Il n’est pas évolutionniste : le progrès, à ses yeux, n’a rien de fatal ; l’idée de progrès, quand elle n’est pas l’idée d’un progrès moral, est un « bilboquet physiologico-politique » qui ne résiste pas deux minutes à l’examen ; le mouvement, sans doute, existe, et Proudhon, avant M. Bergson, donne de l’esprit cette définition, qu’il est un mouvement : moveor, ergo sum ; mais ce mouvement, essentiel à l’humanité et à l’univers, est sujet à interruption, à renversement, à chute, et c’est alors la décadence la tension devient détente, le progrès, rétrogradation, et c’est la corruption universelle, dont le monde
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