Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 2, 1912.djvu/18

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Les idées dominantes d’un temps n’ont jamais été que les idées de la classe dominante ? Fidèle à cette doctrine, Georges Sorel peut ensuite écrire et démontrer que « la théorie du progrès a été reçue comme un dogme à l’époque où la bourgeoisie était la classe conquérante », et qu’il faut « la regarder comme étant une doctrine bourgeoise », que « l’historien marxiste doit rechercher comment elle dépend des conditions au milieu desquelles on observe la formation, l’ascension et le triomphe de la bourgeoisie »[1]. Le syndicalisme sera donc avant tout à ses yeux une philosophie élaborée par la classe ouvrière ; et la seule philosophie assez souple pour la comprendre et la relier aux notions de l’esprit humain vers la philosophie bergsonienne.

Le syndicalisme est alors l’interprétation de la question sociale par la classe ouvrière elle-même ; écoutons les militants du syndicalisme avant d’en écouter les métaphysiciens : « Pour nous, syndicalistes révolutionnaires, écrit Victor Griffuelhes, la lutte repose non sur des sentiments, mais sur des intérêts et des besoins… La question ouvrière est posée par nous de la façon suivante : lutter contre le patronat pour obtenir de lui, et à son désavantage, toujours plus d’améliorations, en nous acheminant vers la suppression de l’exploitation… Nous donnons à notre organisation le caractère provoqué non par nous, mais par les conditions imposées par le régime capitaliste aux travailleurs. Cca conditions sont dictées par le patronat avec l’appui du pouvoir qui en est l’émanation et le représentant. Les faits sont là qui montrent le rôle de l’État en faveur des exploiteurs. Et c’est parce que les faits sont indiscutables et connus qu’il suffit d’affirmer le caractère indépendant que nous voulons donner à l’action

  1. Karl Marx. Manifeste communiste, trad. Andler.