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discours d’henri lagrange

LA FAMILLE CHEZ PROUDHON
ET DANS LA DÉMOCRATIE

En me demandant de vous parler de la famille, vous vous êtes adressé au père de famille, au militant syndicaliste, à l’instituteur rural que je suis. Dans ces conditions, j’ai bien volontiers répondu à votre appel. Vous aurez la bonté de négliger la forme de ma causerie pour ne retenir que le fond des réflexions qui suivent.

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Le sort de la famille n’intéresse pas forcément l’homme d’État. Que les divorces augmentent, que l’union libre soit en progrès, que les naissances diminuent, il n’y a pas toujours là de quoi troubler sa sérénité : « L’ordre maintenu dans la rue — écrit Proudhon — la force restant à la loi, l’homme d’État pourrait se reposer sur son œuvre, et l’on n’aurait plus qu’à répéter le proverbe : le monde va tout seul. »

Mais comment ce sort ne passionnerait-il pas le syndiqué sérieux qui sent vivement que le système capitaliste ne peut pas durer plus longtemps ? Le syndiqué voit que nous allons à des transformations profondes dont il faut prendre son parti. Il en est parfois comme effrayé. L’idée lui vient alors de revenir en arrière, d’abandonner son syndicat et de vivre égoïstement. Impossible ! Il devine que son mouvement de recul n’arrêterait rien et que le torrent ouvrier poursuivrait sa course irrésistible.

Cependant, en continuant à réfléchir, il se tranquillise. « Nous pouvons sans crainte marcher de l’avant — dit-il — si nous continuons à pratiquer nos vertus tradition-