Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 3-4, 1912.djvu/68

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
quelques jugements de proudhon

scientifique qui lui a valu, tous frais payés, 25.000 francs ; il est décoré de la Légion d’honneur ; il a obtenu, sur sa demande, la chaire d’hébreu ; après avoir vu sa popularité ébranlée, il l’a raffermie par une profession d’athéisme faite à propos ; son cours est donc suspendu : qui se soucie de son hébreu ? Mais il est célèbre, riche, en faveur auprès de la démocratie comme auprès du pouvoir ».

Ce qu’il y a de piquant, c’est que ces fragments où les idoles de notre démocratie laïque et anticléricale sont si sévèrement jugées et si bien déshabillées, avaient été supprimés de la Correspondance : M. Droz nous les donne, grâces lui soient rendues ! Nous savions déjà d’ailleurs comment Proudhon appréciait Renan ; il n’y a qu’à lire, dans Jésus et les Origines du Christianisme, les lignes suivantes, non moins suggestives : « Quant aux hommes de l’école de M. Renan, qui bafouent la croyance et insultent à l’esprit révolutionnaire, ils sont nos ennemis à tous. Leur idéalisme n’est que corruption ; c’est la mort du droit, comme de la piété ; c’est le mépris de toute chose divine et humaine, érigé en dogme ; l’égoïsme, empoisonneur obscène et lâche, qui souille de son venin tout ce que les hommes respectent, soit à titre de vérité et de droit, soit à titre d’inspiration et de foi. Dieu et les hommes, la religion et la justice, le Christ et la Révolution, sont également outragés dans ce livre, et ce sera l’éternel opprobre que la fortune dont il a joui ». (p. 96–97).

Que la démocratie anticléricale aille donc, après cela, revendiquer Proudhon pour un des siens : je le conseille vivement à M. Bouglé. Et voici, pour nos autres maîtres du jour, alliés de nos laïques dans leur démolition du patrimoine français : « Qui défend les majorats littéraires ? Un démocrate, M. Renan, un martyr. — Qui soutient la cause du libre échange ? M. Dollfus, le propriétaire du Temps et le Siècle, et la Presse et tutti quanti. Est-ce que vous supposez vraiment que MM. Dollfus et Pelletan me sont plus sympathiques que les Paradol et les Allary ? Le Juif et l’Anglais sont les maîtres en France : qui s’en émeut ? personne. Si un homme avisé osait dire un mot contre les Juifs, on crierait que c’est un attardé du Moyen-Âge, un vieux superstitieux ». Proudhon antisémite ? Eh, bonnes gens, lisez encore ceci, que j’extrais du 5e livre de la Justice (Notes et éclaircissements). « M. About déplore quelque part, s’il m’en souvient, la manière dont les Juifs sont traités à Rome. En cela encore, il a parfaitement raison. Mais, les choses devant rester partout, quant au temporel, ce qu’elles sont, j’avoue que j’aime encore mieux les Juifs dans le ghetto que rois de l’époque. Que le pape emprunte l’argent des Rothschild, s’il veut ; qu’il confie l’exécution de ses chemins de fer à Mirès, soit : mais qu’il les