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DE MAL EN PIS.

vous avez ajouté celle de prier votre père et monseigneur de vouloir bien me protéger.

lisarda, à part.

Occupée de ses ennuis, elle ne s’est pas aperçue que je parlais des miens. Dieu me garde de la désabuser ! (Haut.) Ne me remerciez pas, mon amie… Ce serait plutôt à moi de vous remercier… J’aurais désiré en cette circonstance avoir tout empire sur mon père pour vous servir.

le gouverneur.

Vous offensez ma tendresse, ma fille ; je ferai pour cette dame, vous le verrez, tout ce qui sera en mon pouvoir.

flerida.

Je vous rends mille grâces à tous deux.

le gouverneur, bas, à Lisarda.

Savez-vous quelle est cette dame ?

lisarda.

Non, seigneur ; mais je voudrais bien le savoir pour me diriger dans ma conduite avec elle.

le gouverneur.

C’est une femme de qualité qu’un homme a enlevée de la maison paternelle. Apprenez par son exemple, ma fille, à quels dangers s’expose une femme quand elle oublie le soin de son honneur.

lisarda, à part.

C’est la suite de la leçon de ce matin.


Entre UN DOMESTIQUE.
le domestique, au Gouverneur.

Un cavalier qui arrive de voyage demande à être introduit auprès de vous.

le gouverneur.

Ce sera sans doute don Juan. Qu’il entre.

Le domestique sort.
lisarda, à part.

Hélas ! nouvelle peine !

flerida.

Je me retire, de peur d’être indiscrète.

Flerida sort.


Entre DON JUAN on habit de voyage.
don juan.

Je me félicite, seigneur, que le ciel m’ait permis, après tant de travaux, de pouvoir enfin baiser votre main. À partir d’aujourd’hui, puisqu’un si grand bien m’est accordé, je pardonne à la fortune tous les sujets de plainte qu’elle m’a donnés pendant ma vie. Cette unique grâce me constitue son débiteur.

le gouverneur.

Soyez le bienvenu, don Juan. Il y a déjà long-temps que vous