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DE MAL EN PIS.

son ?… — Situation horrible ! Puis-je tuer un homme confié à ma foi ? puis-je épargner celui dont j’ai reçu cette injure ?… Ô ciel ! dans ces mouvemens contraires, que ne puis-je d’une main le défendre et le tuer de l’autre !… — Mais non, qu’il meure ! quand l’honneur est offensé il n’y a plus ni respect humain, ni égards, ni parole… (Appelant.) Don César !

don césar, sortant de la chaise.

Interdit et confondu en vous voyant, je voudrais me jeter à vos pieds.

don juan.

Suivez-moi, don César, et laissons là des complimens hors de propos.

don césar.

Où me conduisez-vous ?

don juan.

J’irai seul avec vous. Je n’ai que mon manteau et mon épée. Ne craignez rien.

don césar.

Je ne crains certainement aucune trahison d’un homme de votre naissance et de votre mérite. — Si je vous adresse cette question, c’est pour vous détourner d’une chose dont vous auriez plus tard du regret.

don juan.

Comment cela ?

don césar.

J’ai une excuse.

don juan.

Vous ?

don césar.

Oui.

don juan.

Dieu le veuille !

don césar.

Daignez m’écouter.

don juan.

Marchons toujours.

don césar.

Non ! vous m’entendrez ici ; mais si nous sortons une fois, je n’aurai plus à vous parler qu’avec l’épée. Ici les explications, et dehors le combat.

don juan.

Qu’avez-vous donc à me dire, vous qui avez offensé en même temps mon honneur, mon amitié et ma confiance ?… mon honneur, puisque vous avez osé forcer cette maison ; mon amitié, puisque sachant que je prétends à la main d’une femme, vous la poursuivez et la servez ; ma confiance, puisque vous avez trouvé en elle une