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JOURNÉE III, SCÈNE III.

qui put nous ouvrir, nous sortirions d’ici ; c’est l’essentiel. Après, il nous sera facile de nous excuser d’avoir manqué au rendez-vous. Et quand même… il n’importe. — Voyez un peu à travers la serrure, Laura, je vous prie.

flerida.

Je vois Celia, madame, qui travaille assise près d’une fenêtre donnant sur le jardin.

lisarda.

Écartez-vous un peu, que je l’appelle. (Appelant.) Tst ! tst ! Celia !… Tst ! tst ! Celia !… (À Flerida.) Elle ne nous voit pas, et ne sachant de quel côté on l’appelle, elle tourne autour de la chambre comme une folle… (Appelant.) Par ici, Celia, par ici !

celia, du dehors.

Qui m’appelle ? qui est-ce ?

lisarda.

C’est moi, Celia. Je te dirai après ce qui en est. Ouvre-moi cette porte au plus tôt, si tu peux.

celia, du dehorS.

Mon maître doit en avoir la clef sur son secrétaire. Attendez un moment. Je cours la chercher.

lisarda.

Fais vite. — Oh ! puisse-t-elle revenir à temps !

flerida.

Il sera trop tard.

lisarda.

Pourquoi ?

flerida.

J’entends ouvrir l’autre porte, et l’on entre. C’est un homme !

lisarda.

C’est don Juan !… que le ciel me soit en aide !… — Laura, ôtez-moi cette mante, et vous, couvrez-vous bien le visage… Quelque chose que je dise, ne me démentez pas, ne me trahissez pas. Sauvez-moi la vie et l’honneur !


Entre DON JUAN.
don juan, à part.

Elle n’est pas dans la première pièce ; elle aura voulu visiter tout l’appartement. (Apercevant Lisarda.) Quoi ! madame, c’est vous ?

lisarda.

Oui, seigneur don Juan, c’est moi ! Comme cette dame vous attendait, je n’ai point voulu qu’elle fût seule, et je suis venue, en entrant par cette porte qui donne chez moi, lui tenir compagnie jusqu’à votre arrivée. Vous êtes, sur ma foi ! un galant comme il y en a peu. Vous épousez une dame, et vous en courtisez une autre !

don juan.

Mais, madame…