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LE PIRE N’EST PAS TOUJOURS CERTAIN.

ginès.

Seigneur, où êtes-vous donc ?… le chirurgien vous attend.

don carlos.

Meurs, traître ?

ginès.

Je suis mort ! — II suffit que vous l’ordonniez… Du diable si attendrais que ce fût pour tout de bon !

Il sort.
un homme de la foule.

On a tué un homme… Gare maintenant la justice… Sauvons-nous tous, mes amis.

Ils sortent.
don juan.

Holà ! un flambeau ! Je vais moi-même en chercher un !

Il sort.
léonor.

Combien je suis émue ! et combien mes malheurs m’accablent !… Je n’ai pas la force de m’éloigner.

don carlos.

Je reste ici, à mon poste… Ils ont beau fuir les uns après les autres, je dois rester où j’ai tiré l’épée !


Entre DON JUAN, avec un flambeau.
don juan.

Maintenant, nous allons y voir…

léonor.

Arrêtez, don Carlos.

don juan.

Quoi ! tous deux seuls ?

don carlos.

Pourquoi vous étonner ?… l’un de mes ennemis ayant disparu, je suis demeuré avec le plus acharné ; mais celui-ci, pour le vaincre, il faut le fuir.

Il veut s’en aller, don Juan le retient.
don juan.

Arrêtez !

don carlos.

Laissez-moi, de grâce, laissez-moi fuir cet ennemi… que je puisse poursuivre l’autre.

don juan.

À cette heure vous ne pourriez les atteindre…

léonor.

Ah ! je voudrais pouvoir déchirer mon sein et vous montrer mon cœur tel qu’il est… Mon cœur vous attesterait la vérité de mes paroles, et peut-être seriez-vous persuadé.

don carlos.

Votre cœur nécessairement doit être habile à tromper.