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L’ESPRIT FOLLET.

cosme.

Oh ! si ce n’est que le loisir qui vous manque, moi, seigneur, j’en ai beaucoup, et je pourrai vous en céder.

don louis.

Laissez-moi.

don manuel, à part.

Maudite rue ! elle semble tirée au cordeau… et il peut la voir encore.

cosme.

Au nom du ciel ! mon seigneur…

don louis.

Vive Dieu ! vous m’ennuyez… et si vous ne me laissez passer, je vous casse la tête.

cosme.

Il vous en coûterait si peu cependant de…

don louis.

Je perds la patience… (Il le repousse avec violence.) Allons, ôtez-vous.

don manuel, s’avançant vers don Louis.

Il est temps de me montrer. Ce que l’adresse a commencé, il faut que le courage l’achève. (À don Louis.) Cavalier, ce valet est à moi, et je voudrais savoir en quoi il a pu vous offenser pour que vous le traitiez de la sorte ?

don louis.

Information ou plainte, je ne répondrai pas. Je n’ai jamais donné satisfaction à des questions de ce genre. Adieu.

don manuel.

Si je pensais avoir besoin d’une satisfaction, vous pouvez croire, malgré votre arrogance, que je ne m’éloignerais pas sans l’avoir obtenue. Lorsque je vous demande en quoi cet homme vous a manqué, je ne devais pas m’attendre à une impolitesse. La cour, dit-on, enseigne la courtoisie ; et je ne pensais pas qu’un étranger pût l’apprendre à un cavalier qui habite Madrid.

don louis.

Penser et dire que j’ai besoin d’une leçon de courtoisie…

don manuel.

Point de vaines paroles… l’épée seule doit parler.

don louis.

Vous avez raison.

Ils tirent leurs épées et se battent.
cosme.

Oh ! que n’ai-je, moi aussi, envie de me battre !

rodrigue, à Cosme.

Nos maîtres se battent ; voulez-vous en faire autant ? Allons, tirez l’épée.