Page:Calderón - Théâtre, trad. Hinard, tome III.djvu/274

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

LE PRINCE CONSTANT.

(EL PRINCIPE CONSTANTE.)



NOTICE.


Le Prince constant étant une comédie historique, nous allons d’abord, selon notre habitude, exposer rapidement les faits d’après lesquels le poëte a composé son ouvrage.

En 1437, les deux infants de Portugal, Fernand, grand maître de l’ordre d’Avis, et Henri, grand maître de l’ordre du Christ, tous deux vaillants et avides de gloire, proposèrent au roi don Édouard, leur frère, de porter la guerre en Afrique, où la bravoure des Portugais s’était déjà signalée. Malgré l’opinion des hommes les plus sages du conseil, le roi donna son consentement à ce projet ; et bientôt les infants et leur armée, au nombre de sept à huit mille hommes, débarquaient sur la côte africaine. Après quelques succès de peu d’importance, les infants mirent le siège devant Tanger. Ils livrèrent inutilement trois assauts. Sans se laisser décourager par cette résistance, et bien qu’ils manquassent d’eau et de vivres, ils maintenaient leur camp devant la place, lorsqu’ils se trouvèrent enveloppés par des masses prodigieuses d’infanterie et de cavalerie arabe : c’étaient les populations de Fez et de Maroc qui accouraient au secours de leurs frères. Les Portugais eurent la permission de se rembarquer, à la condition de rendre Ceuta ; et l’infant don Fernand, promoteur de la guerre, fut gardé en otage, jusqu’à la ratification de ce traité. — Lorsque l’infant don Henri fut de retour en Portugal, le roi convoqua les Cortez pour savoir ce que l’on devait faire. Les députés des villes furent d’avis qu’on devait donner Ceuta pour racheter la liberté et la vie d’un prince du sang. Mais les grands et le clergé pensèrent que restituer cette ville, c’était exposer les habitants à chanceler dans leur foi, et qu’il valait mieux procurer au prince chrétien la couronne du martyre. Fernand resta donc captif en Afrique. — L’année suivante (1438), Édouard, par son testament, ordonna qu’on rachetât l’infant en rendant Ceuta ; mais comme son fils était mineur, cette clause du testament ne reçut pas d’exécution ; et en 1443, l’infant mourut de langueur et de misère après six années de captivité. — Ce fut seulement vingt-neuf ans plus tard que le roi Alphonse, à la suite d’une brillante expédition en Afrique, échangea un prisonnier de distinction contre le corps du prince. — Fernand fut honoré comme un martyr, et, s’il faut en croire la légende, de nombreux miracles se seraient opérés par son intercession dans le monastère de la Batailla, où ses restes mortels avaient été transportés.