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LE PRINCE CONSTANT.

fénix.

Mon respect pour le roi m’a seul empêchée de le briser.

muley.

Donne-le moi !… j’ai bien le droit d’arracher de tes mains celui qui m’arrache de ton cœur.

Ils sortent.

Scène II.

La côte d’Afrique, près de Tanger.
Bruit de trompettes. Entrent successivement DON FERNAND, DON HENRI, DON JUAN COUTIÑO, et des Soldats.
don fernand.

Je veux être le premier, belle Afrique, à fouler de mon pied le sable de ton rivage, afin que tu sentes la puissance qui te doit soumettre.

don henri.

Moi, je serai le second à toucher de mon pied le sol africain. (Il tombe.) Dieu me soit en aide ! de sinistres présages m’ont accompagné jusqu’ici.

don fernand.

Chassez de votre esprit, mon frère, une semblable inquiétude. Si vous êtes tombé, c’est que cette terre, vous reconnaissant comme son seigneur, vous a ouvert les bras pour vous recevoir.

don henri.

En nous voyant, les Mores ont abandonné cette plaine et les montagnes voisines.

don juan.

Tanger a fermé ses portes.

don fernand.

Tous ont cherché un asile contre notre courage. — Don Juan Coutiño, comte de Miralva, reconnaissez soigneusement ce pays avant que le soleil, dégagé des vapeurs du matin, nous frappe de rayons plus ardents. — Approchez-vous de la ville, et faites-lui la première sommation, en lui disant qu’elle n’essaye point de se défendre ; sans quoi elle sera détruite de fond en comble, et le sang de ses habitants inondera la campagne.

don juan.

Je vais m’avancer jusqu’à ses portes, dût ce volcan de foudres et de flammes obscurcir le soleil d’un nuage de fumée.

Il sort.


Entre BRITO.
brito.

Grâce à Dieu ! je marche sur la terre ferme. Je vais où il me plaît, sans éprouver ni inquiétudes, ni nausées, ni maux de cœur. Je ne suis plus sur cette vilaine mer, où l’on est à la merci d’une machine composée de quelques morceaux de bois, et où le plus leste,