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LE SECRET À HAUTE VOIX.

lisardo.

Quoique bien à regret, j’obéis.

henri.

Et moi de tout mon cœur ; en me réservant de demeurer, comme l’héliotrope, tourné vers le plus beau soleil. (Arnesto et Laura sortent.) Frédéric, je reviens à l’instant.

Il sort.
lisardo.

Jusqu’à ce que je n’aperçoive plus rien de la lumière qui émane de vous, Laura, je ne puis vous quitter ; car votre beauté divine est l’étoile polaire de ma pensée.

Il sort.
frédéric.

Oh ! combien je me réjouis d’être seul enfin ! je pourrai lire cette lettre.

fabio.

Si je ne perds pas l’esprit à ce coup, c’est qu’en vérité je n’ai rien à perdre.

frédéric.

D’où vient ton étonnement ?

fabio.

De votre sang froid. Car vous avez cette lettre depuis la nuit, et vous ne l’avez pas encore ouverte.

frédéric.

Sais-tu quelle est cette lettre ?

fabio.

Qu’elle soit ce qu’elle voudra, il n’en est pas moins certain que vous l’avez gardée depuis hier sans l’ouvrir.

frédéric.

Je ne fais que de la recevoir !

fabio.

Vous me feriez perdre la raison. Ne sais-je pas que depuis ce matin personne ne vous a parlé ? Ce serait donc alors le vent qui vous l’aurait apportée ?

frédéric.

Celui qui me l’a apportée, c’est le feu, le feu où je brûle et me consume.

fabio.

Le feu ?

frédéric.

Oui.

fabio.

Je commence à croire à présent qu’il est vrai que…

frédéric.

Qu’est-ce qui est vrai ?

fabio.

Que vous êtes fou, et que, galant fantôme, vous vous êtes créé