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LES BELLINI.

Gentile a certainement conquis, depuis plusieurs années, son indépendance. Il aide, il est vrai, encore son père, mais c’est en collaborateur et non plus eu élève. Nous savons notamment qu’il reçut la commande de deux toiles pour la Scuola di San Marco, en 14666. Il s’y rencontra, aux côtes de Jacopo, avec le vieux Squarcione et avec Bartolommeo Vivarini. Mais Squarcione n’avait rien à lui enseigner que Mantegna ne lui eût déjà appris, et Bartolommeo, son contemporain, était surtout un peintre d’église : sa présence ne devait provoquer, chez Gentile Bellini, qu’une noble émulation.

J’ai déjà parlé de la distinction que l’empereur Frédéric III accorda, trois ans plus tard, au chef de la jeune école vénitienne. Si l’on songe que ce même titre fut décerné plus tard par Charles-Quint au Titien, dans tout l’éclat de sa gloire, on pourra se faire une idée de la réputation dont Gentile jouissait à cette époque. Mais la réputation ne suffit pas, et elle doit, pour tout bon Vénitien, s’allier à d’autres avantages.

Depuis 1422, les fresques de la salle du Grand Conseil donnaient les plus vives inquiétudes. Par suite, sans doute, du climat humide de la ville, l’œuvre de Gentile da Fabriano et de Pisanello se détériorait rapidement. On avait déjà fait divers efforts pour la sauver lorsque, en 1474, Gentile Bellini fit à la Seigneurie l’offre de ses services. IL se chargeait de restaurer les fresques sans réclamer d’autre salaire qu’une indemnité couvrant ses frais, « à condition qu’on lui promît la première place de