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pour m’entretenir de son projet, fut sans aucun doute de me fournir les moyens d’expliquer la nature des sentimens qui la déterminaient à préférer une gouvernante, disposée par l’amitié à la laisser jouir de tous ses droits de mère : elle savait que je recevais beaucoup de monde.

La reine dînait très-souvent chez la duchesse, après avoir assisté au dîner particulier du roi. On fit donc ajouter à son traitement de gouvernante soixante-un mille francs, comme dédommagement de ce surcroît de dépenses.

La reine s’était ennuyée des voyages de Marly, et n’avait pas eu de peine à en dégoûter le roi qui en redoutait les dépenses, tout le monde y étant nourri. Louis XIV avait établi pour ces voyages un genre de représentation différent de celui de Versailles, mais encore plus gênant.

Le jeu et le souper avaient lieu tous les jours, et exigeaient beaucoup de toilette ; le dimanche et les jours de fêtes, les eaux jouaient, le peuple était admis dans les jardins, et il y avait toujours autant de monde qu’aux fêtes de Saint-Cloud.

Les siècles ont leur couleur, et bien positivement ; Marly reportait encore plus que Versailles vers celui de Louis XIV : tout semblait y avoir été construit par la magique puissance d’une baguette de fée.

Les palais, les jardins de cette maison de plaisance pouvaient aussi se comparer aux décorations théâtrales d’un cinquième acte d’opéra. Il n’existe plus la moindre trace de tant de magnificence ; les