Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/280

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placer avec ironie une phrase sur mon beau-père qu’il appela depuis ce moment : Mon collègue Campan. La reine haussait les épaules, et disait lorsqu’il était retiré : « Il est affligeant de trouver un si petit homme dans le fils du maréchal de Richelieu. »

La Gageure imprévue fut au nombre des pièces représentées à Trianon. La reine jouait le rôle de Gotte, la comtesse Diane, celui de madame de Clainville, madame Élisabeth, la jeune personne, et le comte d’Artois, un des rôles d’homme. Le rôle de Colette, dans le Devin du village, fut réellement très-bien joué par la reine. On représenta aussi, les années suivantes, le Roi et le Fermier, Rose et Colas, le Sorcier, l’Anglais à Bordeaux, On ne s’avise jamais de tout, le Barbier de Séville, etc.[1]

Tant qu’on n’admit personne à ces représentations, elles furent peu blâmées ; mais l’exagération des complimens augmenta l’idée que les acteurs avaient de leurs talens, et donna le désir d’obtenir plus de suffrages.

  1. Ces représentations, dans lesquelles Marie-Antoinette se plaisait à prendre un rôle, ont été plus d’une fois l’objet de la censure. Montjoie lui-même, comme on le verra dans les éclaircissemens (S), adresse à la reine, sur ce sujet, des reproches presque sévères, et fait des observations qui ne me semblent pas exactes. « Autrefois un simple gentilhomme eût été déshonoré, dit-il, si l’on eût cru qu’il se fût métamorphosé en comédien, même dans l’intérieur d’une maison. » Je ne déciderai pas s’il eût été plus déshonorant pour un simple gentilhomme, de jouer la comédie, par exemple, que de faire, comme le comte de Grammont, soutenir, par un détachement de cavalerie, une partie de piquet où