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d’annoncer à la reine que, décidément, puisque sa présence lui était importune, il allait se retirer dans sa province. La reine fut fort aise et me recommanda de bien exprimer à M. de Sèze toute sa satisfaction. Une demi-heure après que M. de Sèze fut parti, on m’annonça le malheureux fou ; il venait me dire qu’il se rétractait, qu’il ne pouvait, par le seul effet de sa volonté, cesser de voir la reine aussi souvent que cela lui était possible. Cette nouvelle réponse était désagréable à porter à Sa Majesté ; mais combien je fus touchée de l’entendre dire : Eh bien, qu’il m’ennuie ! mais qu’on ne lui ravisse pas le bonheur d’être libre[1].

On n’avait connu l’influence directe de la reine, dans les affaires, pendant les premières années du règne, que par la bonté qu’elle mit à obtenir du roi la révision de deux procès célèbres[2].

  1. Lors de la funeste arrestation du roi et de la reine à Varennes, ce malheureux Castelnaux voulut se laisser mourir de faim ; ses hôtes, inquiets de son absence, firent forcer la porte de sa chambre ; on le trouva sans connaissance, étendu sur le parquet. J’ignore ce qu’il est devenu depuis le 10 août.
    (Note de madame Campan.)
  2. La reine ne s’était permis de se mêler de ces deux procès que pour en solliciter seulement la révision ; car il n’était nullement dans ses principes d’intervenir en rien dans ce qui concernait la justice, et jamais elle ne se servit de son influence auprès des tribunaux. La duchesse de Praslin, par une criminelle bizarrerie, avait porté son inimitié pour son mari jusqu’à déshériter ses enfans en faveur de la famille de M. de Guéménée. Cette injustice amena naturellement un grand procès dont Paris était très-occupé. La