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sance ; elle ne trouvait dans le monde qu’estime, bienveillance et considération. Souveraine dans sa maison, son sort paraissait à l’abri des faveurs et des caprices du pouvoir. Mais l’homme qui disposait alors des destinées de la France, et qui réglait avec l’épée celles de l’Europe, allait bientôt en décider autrement.

Un décret, daté pour ainsi dire du champ de bataille, assurait de nouvelles récompenses, offrait de nouveaux encouragemens à la bravoure des vainqueurs d’Austerlitz. L’État se chargeait d’élever, à ses frais, les sœurs, les filles, les nièces de ceux que décorait la croix d’honneur. Les enfans des guerriers, blessés ou morts en combattant avec gloire, devaient retrouver les soins de la maison paternelle dans l’antique demeure des Montmorency et des Condé : ces héros eux-mêmes n’auraient pu lui trouver de plus noble destination. Habitué à rapprocher de lui toutes les supériorités, n’en redoutant aucune, Napoléon chercha la personne que son expérience, son nom, ses talens, pouvaient placer à la tête de la maison d’Écouen ; ce fut madame Campan qu’il désigna.

Elle allait recueillir les fruits d’une expérience acquise pendant dix ans à Saint-Germain. L’établissement d’Écouen était à créer tout entier : madame Campan commença donc ce grand ouvrage. L’élève, l’ami, le rival de Buffon, M. le comte de Lacépède, alors grand-chancelier de la Légion-d’Honneur, la dirigeait de ses conseils éclairés. La surveillance qu’exigent la santé, l’instruction, et jusqu’aux jeux de trois cents jeunes personnes ; les devoirs religieux qui servent de base à leur éducation ; la distribution de leur temps, l’emploi méthodique et gradué des forces de leur intelligence ; l’accord de leurs