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de mariage. Je rougirais, répondit-elle, si l’on me présentait cette preuve de la charlatanerie de mon éducation ; je ne crois pas avoir une seule fois posé le crayon sur ce dessin. Cependant elle savait parfaitement ce qui lui avait été enseigné. Sa facilité à apprendre était inconcevable, et si tous ses maîtres eussent été aussi instruits et aussi fidèles à leurs devoirs que l’abbé Métastase, qui lui avait enseigné l’italien, elle aurait atteint le même degré de supériorité dans les autres parties de son éducation. La reine parlait cette langue avec grâce et facilité, et traduisait les poëtes les plus difficiles. Elle n’écrivait pas le français correctement, mais elle le parlait avec la plus grande aisance, et mettait même de l’affectation à dire qu’elle ne savait plus l’allemand. En effet, elle voulut essayer, en 1787, d’apprendre sa langue maternelle, et en prit des leçons avec assiduité pendant six semaines ; elle fut obligée d’y renoncer, éprouvant toutes les difficultés qu’aurait à vaincre une Française qui se livrerait trop tard à cette étude. Elle abandonna de même l’anglais que je lui avais enseigné pendant quelque temps, et dans lequel elle avait fait des progrès rapides. La musique était le talent qui plaisait le plus à la reine. Elle ne jouait bien d’aucun instrument, mais elle était parvenue à déchiffrer à livre ouvert, comme le meilleur professeur. Elle avait acquis ce degré de perfection en France, cette partie de son éducation ayant été aussi négligée à Vienne que les autres. Peu de jours après son arrivée à Ver-