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sonne vers laquelle se dirigeaient les pas de la reine, lorsqu’elle lui dit : « M. d’Orville, il y a plusieurs années que vous êtes à Versailles pour y solliciter une majorité ou une lieutenance de roi. Il faut que vous ayez de bien faibles protecteurs. — Je n’en ai point, Madame, répondit le pauvre chevalier tout troublé. — Eh bien ! je serai votre protectrice. Demain à pareille heure, trouvez-vous ici avec un placet et un état de vos services. » Quinze jours après, M. d’Orville fut nommé lieutenant de roi, de La Rochelle ou de Rochefort[1].


La vraie sensibilité de la reine lui fournissait à l’instant même les choses les plus flatteuses et les

  1. Il paraît que Louis XVI disputait à la reine le prix de ces actions bienfaisantes. On en jugera par l’anecdote que rapporte un ouvrage publié sous son règne.

    « Un ancien officier avait inutilement sollicité une pension sous le ministère de M. le duc de Choiseul : il était revenu à la charge du temps de M. le marquis de Monteynard et de M. le duc d’Aiguillon. Il avait insisté auprès de M. le comte du Muy, qui avait pris note de son affaire dans les meilleures intentions du monde de le servir ; mais l’effet ne suivait pas la volonté du ministre. Lassé de tant de démarches inutiles, il se présenta dernièrement au souper du roi, et, s’étant placé de manière à pouvoir être vu et entendu, il s’écria dans un moment où le silence régnait : Sire ! Ceux qui étaient autour de lui, lui dirent : « Qu’allez-vous faire ? On ne parle pas ainsi au roi. — Je ne crains rien, »