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LETTRE XXVIII.

Élisa à Zoé.

Château de ..... près de Clermont, ce 30 août 1808.

Après nous être reposées un jour à Clermont, ma chère Zoé, nous sommes arrivées au château de .... ; l’aspect en est majestueux. Lorsque l’on vient de passer à travers les gorges des plus hautes montagnes, quand on a gravi des routes tournantes, où l’on a d’un côté d’immenses rochers qui cachent une partie du ciel, et de l’autre, des précipices effroyables à regarder, on ne s’attend nullement à trouver une plaine et une longue allée de peupliers terminée par un magnifique château. L’entrevue de la maréchale et de ma mère a été bien touchante. Le souvenir des temps passés, la mémoire de leurs deux maris, la vue du changement que le temps a empreint sur leurs propres traits, toutes ces diverses sensations les ont précipitées dans les bras l’une de l’autre. « Oh ! Madame, disait la vieille maréchale, que d’événemens se sont passés depuis le jour où ce brave major vous conduisit à Paris ! — Que vous avez souffert, Madame la maréchale ! répondit ma mère. — Et vous, Madame, quelle perte irréparable vous avez faite, ainsi que