Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/20

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, vague encore et sans cesse menacé, qu’on n’aurait pas recours à elles. Qui donc pouvait le soupçonner ? Sa conduite, jusqu’alors, le mettait à l’abri des soupçons. Et elle était irréprochable, sa conduite… Jamais aucun de ses patrons n’avait eu à lui faire la moindre observation. Et puis, Lampieur n’était pas de ces ouvriers qui, si ponctuels qu’ils soient dans leur travail, ont des relations équivoques et fréquentent les concerts et les bals. Ce n’est pas là qu’on pouvait l’avoir vu. Il n’allait pas dans de pareils endroits. Quant au débit du père Fouasse aux Halles, où il prenait chaque soir un verre de vin blanc avant dîner, on l’y connaissait de longue date et Fouasse lui-même, s’il avait été nécessaire, aurait juré que, pas une seule fois depuis qu’il était son client, Lampieur ne s’était enivré.

D’ailleurs, à voir Lampieur avec ses cheveux coupés ras, son pantalon tenu comme au régiment par une bretelle qui servait de ceinture, son tricot à raies bleues, son attitude déjà courbée, ses larges mains, ses épaules puissamment arrondies et l’expression sérieuse de son