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de ces facilités, — une grande quantité de monnaie étant alors nécessaire pour accomplir un faible montant de commerce, comme on peut le voir dans tous les pays du monde purement agricoles et appauvris. L’utilité de la monnaie diminue, mais sa valeur augmente, — c’est alors que l’on thésaurise. Cet accroissement de valeur, accompagnant le déclin d’utilité, se montre dans toutes les opérations de la société ; mais dans aucune aussi pleinement et fréquemment que dans celles qui ont trait à la monnaie.

Pour bien apprécier l’importance comparative d’un faible approvisionnement de matières de manufacture ou de monnaie, examinons un peu ce qui a lieu d’année en année au sujet du colon.

La récolte de 1854-5 était, à celle de 1852-3, inférieure de 400.000 balles équivalant à plusieurs millions de dollars ; et pourtant son effet sur les consommations de coton se borna à ce que ceux qui auparavant achetaient une demi-douzaine de chemises se résignèrent à n’en acheter que cinq, ou bien à payer un surcroît de vingt cents pour leur fourniture habituelle. De même pour le sucre, le café et autres articles dont chaque excès ou chaque déficit dans la récolte d’un pays se compense généralement par un déficit ou un excès ailleurs, — toutes choses restant, à la fin de la saison, à peu près ce qu’elles étaient auparavant, le prix plus haut du coton se compensant par les prix plus faibles du sucre et du tabac.

Ce sont de tels articles que les oscillations dans la quantité de monnaie affectent le moins, à cause de la facilité qu’on a de les expédier aux pays où la monnaie est plus abondante. Il en est d’autres qui ne peuvent aller au dehors et doivent rester en place pour subir les chances du marché de monnaie, — ce sont la terre et le travail. De toutes les utilités, l’homme, est la dernière à déplacer aisément, la terre excepté. Le surcroît dans la quantité de monnaie atteste surtout leurs prix, il en est de même d’une diminution. C’est pourquoi, lorsque la monnaie devient rare, il y a tant de souffrance parmi ceux qui ont à vendre leur travail, et tant de ruine parmi ceux qui se sont hasardés à construire des routes, bâtir des usines et des fourneaux, ou faire toutes autres choses qui tendent à donner valeur à la terre. On peut exporter le coton et le sucre, et non les chemins de fer. Le drap, le fer peuvent aller au dehors en quête d’un marché ; le travailleur, avec sa femme et ses enfants, est lié à sa demeure. La terre, et la population qui la