Page:Caro - George Sand, 1887.djvu/156

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dictait ces vives et fines reparties était bien à elle ; c’était elle-même et une autre, très différente de ce qu’elle était dans la vie réelle.

« Ce n’est, nous dit-on encore, ni par un éclat extraordinaire ni par la perfection plastique que son style se recommande, mais par des qualités qui semblent encore tenir de la bonté et en être parentes. Car il est ample, aisé, généreux, et nul mot ne semble mieux fait pour le caractériser que ce mot des anciens : Lactea ubertas, une abondance de lait, un ruissellement copieux et bienfaisant de mamelle nourricière », et l’image entraîne une hardie et charmante apostrophe à la « douce Io du roman contemporain »[1]. Rien de plus aimable, assurément. C’est l’hommage d’un écrivain qui, parmi les jeunes, est un de ceux qui l’ont le plus et le mieux aimée. Un mot pourtant nous inquiète. On reproche à ce style si expressif et si coloré de n’être pas suffisamment plastique. Que veut-on dire par là ? Sans doute qu’il n’est pas assez fortement modelé sur les formes réelles, qu’il n’en dessine pas assez rigoureusement les contours, comme celui de Victor Hugo, de Théophile Gautier ou de Flaubert, qu’il ne s’étudie pas à les mettre en relief ? Est-ce un tort ? S’il n’est pas plastique, c’est-à-dire sculptural, ce style est pourtant très pittoresque, et, quand il s’agit de décrire, il ressemble à une belle peinture. N’est-ce pas une compensation ? Ce style est d’une transparence

  1. M. Jules Lemaître, Revue Bleue, 8 janvier 1887.