Page:Caro - George Sand, 1887.djvu/190

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plaisamment : « Vous voulez savoir plus qu’il n’y en a… L’individu nommé George Sand cueille des fleurs, classe ses herbes, coud des robes et des manteaux pour son petit monde, et des costumes de marionnettes, lit de la musique, mais surtout passe des heures avec ses petits-enfants… Ça n’a pas été toujours si bien que ça. Il a eu la bêtise d’être jeune, mais comme il n’a pas fait de mal, ni connu les mauvaises passions, ni vécu pour la vanité, il a le bonheur d’être paisible et de s’amuser de tout. »

À cette date où je la rencontrai à Nohant, elle arrivait chargée de plantes recueillies sur les bords de la Méditerranée et dans la Savoie. Elle s’effrayait du rangement qu’elle avait à faire dans ses herbes, et de fait elle se livra presque tout le jour à ce travail, en causant. Mais il y avait un bien autre rangement à faire dans la maison. Le cabinet de travail était affreux, et rien qu’à le voir, il donnait le spleen. On en arrangeait un autre, où George Sand comptait travailler avec plaisir. En attendant, son atelier de travail était sa chambre à coucher. Elle me montra sur une table très simple une pile de grandes feuilles de papier bleu, coupées d’avance dans le format in-quarto. « Quand vous partirez ce soir, me dit-elle, je me mettrai à l’ouvrage, et je ne me coucherai que quand j’aurai rempli douze de ces pages. » C’était la tâche quotidienne : le travail était ainsi réglé d’avance ; elle comptait sur l’exactitude de son inspiration, qui ne lui faisait presque jamais défaut.

Ce fut pour moi une occasion presque i