Page:Caro - George Sand, 1887.djvu/200

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tant de succès, au grand scandale de quelques lecteurs, mais de la Correspondance elle-même, un témoin qui ne peut pas mentir. Le 28 avril 1871 elle écrivait à Flaubert : « L’expérience que Paris essaye ou subit ne prouve rien contre les lois du progrès, et si j’ai quelques principes acquis dans l’esprit, bons ou mauvais, ils n’en sont ni ébranlés ni modifiés. Il y a longtemps que j’ai accepté la patience, comme on accepte le temps qu’il fait, la durée de l’hiver, la vieillesse, l’insuccès sous toutes ses formes. Mais je crois que les gens de parti (sincères) doivent changer leurs formules ou s’apercevoir peut-être du vide de toute formule a priori. » Et à Mme Adam, le 15 juin de la même année : « Pleurons des larmes de sang sur nos illusions et nos erreurs… Nos principes peuvent et doivent rester les mêmes ; mais l’application s’éloigne, et il peut se faire que nous soyons condamnés à vouloir ce que nous ne voudrions pas. »

Quoi qu’elle en dise, les principes eux-mêmes s’étaient, non pas ébranlés dans le fond, mais modifiés dans l’application. À un jeune enthousiaste qui lui envoyait des poésies politiques : « Merci, répondait-elle ; mais ne me dédiez pas ces vers-là… Je hais le sang répandu, et je ne veux plus de cette thèse : « Faisons le mal pour amener le bien ; tuons pour créer ». Non, non, ma vieillesse proteste contre la tolérance où ma jeunesse a flotté. Il faut nous débarrasser des théories de 1793 ; elles nous ont perdus. Terreur et Saint-Barthélemy, c’est la même voie… Maudissez tous ceux qui creusent des charniers.