Page:Caro - George Sand, 1887.djvu/40

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avec un nom nouveau. Ce fut Henri Delatouche qui la baptisa ainsi. Sand restait indivis entre Jules Sandeau et elle, réunis par une collaboration pour la première œuvre. On fut vite d’accord sur les prénoms. Sandeau garda le sien ; George était synonyme de Berrichon. « Jules et George, inconnus au public, passeraient pour frères ou cousins. » Les deux noms conquirent bientôt une célébrité qui les sépara de plus en plus l’un de l’autre.

Nous ne racontons pas une biographie, nous essayons seulement de tracer une esquisse psychologique. Notre dessein était de noter les épreuves diverses et les phases intellectuelles qui avaient marqué la jeunesse de Mme Sand. Elle arrivait à la vie littéraire avec un fonds de souffrances très réelles, bien qu’exagérées sans doute par une imagination forte, d’émotions intimes et d’agitations religieuses, irritée plutôt qu’apaisée par des lectures sans règle, avec une sensibilité aiguë et raffinée, un dédain profond pour les vérités relatives dont il faut bien parfois se contenter dans le train du monde, la haine instinctive de tous les jougs qu’impose la loi ou l’opinion, l’horreur innée de tout ce qui engage la liberté de la pensée ou celle du cœur. Ajoutez à cela qu’elle se trouve, presque à son coup d’essai et par le miracle d’une nature prodigue, en possession d’un style merveilleux, qui semble fait tout exprès et comme préparé pour recevoir son ardente pensée, qui s’était formé tout seul et sans conseils, depuis la longue série des petits cahiers consacrés à l’épopée de Corambé