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I 1
[5r]

Histoire de ma vie
jusqu’à l’an 1797

Nequicquam sapit qui sibi non sapit
Cic : ad Treb :


Preface


Je commence par déclarer à mon lecteur que dans tout ce que j’ai fait de bon ou de mauvais dans toute ma vie, je suis sûr d’avoir merité ou demerité, et que par consequent je dois me croire libre. La doctrine des Stoïciens, et de toute autre secte sur la force du Destin est une chimere de l’imagination qui tient à l’atheïsme. Je suis non seulement monothéiste, mais chretien fortifié par la philosophie, qui n’a jamais rien gâté.

Je crois à l’existence d’un Dieu immateriel auteur, et maitre de toutes les formes ; et ce qui me prouve que je n’en ai jamais douté, c’est que j’ai toujours compté sur sa providence, recourant à lui par le moyen de la priere dans toutes mes detresses ; et me trouvant toujours exaucé. Le desespoir tue : la priere le fait disparoitre ; et après elle l’homme confie, et agit. Quels soyent les moyens, dont l’être des etres se sert pour detourner les malheurs imminens sur ceux qui implorent son secours, c’est une recherche au dessus du pouvoir de l’entendement de l’homme, qui dans le meme instant qu’il contemple l’incomprensibilité de la providence divine, se voit réduit à l’adorer. Notre ignorance devient notre seule ressource ; et les vrais heureux sont ceux qui la cherissent. Il faut donc prier Dieu, et croire d’avoir obtenu la grace, même quand l’apparence nous dit que nous ne l’avons pas obtenu. Pour ce qui regarde la posture du corps dans la quelle il faut être quand on adresse des vœux au créateur, un vers du