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TRAITÉ DE LA PEINTURE

un bassin, et prestement mets sur l’eau de ton plâtre. Sois prompt, il prend vite. Fais le plâtre courant, ni trop ni trop peu ; aie un verre, prends de ce plâtre, coule-le remplissant tout autour du visage ; quand tu as également rempli, réserve les yeux pour ne les couvrir qu’après tout le visage. Fais tenir la bouche et les yeux fermés (sans effort, cela ne vaudrait rien), mais comme s’il dormait. Quand tu as tout recouvert à la hauteur d’un doigt au-dessus du nez, laisse reposer un peu tant que le plâtre soit pris.

Rappelle-toi que si celui que tu moules[1] était en grande position, comme seigneur, roi, pape ou empereur, tu pétrirais ton plâtre avec de l’eau de rose tiède ; pour d’autres personnes, l’eau de fontaine, de pluie ou de fleuve, si elle est tiède, est suffisante. Ce que tu viens de faire, une fois pris et sec, enlève gentiment avec un grattoir, une pointe de couteau ou des ciseaux tout autour la bande que tu as cousu. Enlève les tubes du nez avec précaution ; fais redresser le patient sur son séant ou debout, soutenant des deux mains le plâtre qu’il a sur la figure, forme ou masque dont il essayera doucement de retirer son visage. Reprends-la et conserve-la avec soin.

Cette opération terminée, aie une bandelette à emmailloter les enfants, et tourne-la tout autour de cette forme afin que la bandelette dépasse de deux

  1. De ce passage, comme du reste de cette partie de l’ouvrage, nous recevons assez de lumière sur l’art de la statuaire en ces temps. Car les précautions à prendre avec des personnages illustres, comme enseigne Cennino, ne peuvent être de son invention, mais bien des conseils suggérés par l’expérience, qu’il avait reçus de son maître et qui étaient descendus par tradition dans les écoles. L’artifice avec lequel il moule une tête ou des nus entiers démontre que la chose ne pouvait être récente ; d’où on peut croire que Nicolas Pisano et les autres sculpteurs jusqu’au temps de notre auteur s’en servaient. (Cav. Tambroni.)