Page:Cerfberr - Contes japonais, 1893.pdf/21

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
13
le chercheur de trésors.

Ah ! c’était tout un roman, le résultat de mûres réflexions et de patientes recherches… qui d’ailleurs n’avait pas abouti.

La clef de ce mystère ? La voilà.

Logé en vue du volcan, à l’auberge des Roseaux en fleurs, Yori, sur le point de toucher au but, s’était trouvé embarrassé. Comment prendre à un oiseau dans l’air, une branche de glycine qu’il porte au bec, cela sans le toucher et sans que la branche ait été salie par le contact du nid ?

Problème difficile ! si difficile même, que le daïmio, tout chagrin, se donnait à tous les diables de l’enfer japonais.

Aussi, n’accordait-il aucune attention au petit manège de la toute charmante Nareya, la fille de l’aubergiste ; et pourtant celle-ci, dans l’insouciante gaîté de ses quinze ans, tournait autour de lui avec la mobilité du papillon de papier devant l’éventail du bateleur. Évidemment Yori l’intéressait plus que peut-être elle ne se l’eût avoué à elle-même.

Le voyant ainsi triste et préoccupé, elle lui avait demandé le motif de son ennui.

— J’aime Nikkô, ma jolie voisine, répondit-il sans s’expliquer davantage, et il me faut, pour lui plaire, posséder une branche de glycine double que porte l’alouette des marais.

— Nikkô est sans doute bien belle pour être aimée de toi, dit la jeune fille avec un gros soupir.

— Or, reprit Yori, je ne sais comment avoir cette glycine sans tuer l’oiseau, que je voudrais épargner. Voilà pourquoi je suis triste.

— Tu tiens donc beaucoup à cette branche de glycine ?

— Ah ! plus qu’à ma vie !

— Je te comprends, dit Nareya. Quand on aime !

Et un voile s’étendit sur ses beaux yeux ; on eût dit même qu’une larme roulait sous sa paupière aux longs cils noirs, comme une goutte de rosée le matin sur la feuille de chrysanthème. Brusquement elle partit.