Page:Chénier - Œuvres complètes, éd. Latouche, 1819.djvu/121

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C’est ainsi, promené sur tout cet univers,
Que mon cœur vagabond laisse tomber des vers.
De ses pensers errans vive et rapide image,
Chaque chanson nouvelle a son nouveau langage,
Et des rêves nouveaux, un nouveau sentiment :
Tous sont divers, et tous furent vrais un moment.

Mais que les premiers pas ont d’alarmes craintives !
Nymphe de Seine, on dit que Paris sur tes rives
Fait asseoir vingt conseils de critiques nombreux,
Du Pinde partagé despotes soupçonneux
Affaiblis de leurs yeux la vigilance amère.
Dis-leur que sans s’armer d’un front dur et sévère,
Ils peuvent négliger les pas et les douceurs
D’une muse timide, et qui parmi ses sœurs,
Rivale de personne et sans demander grâce,
Vient, le regard baissé, solliciter sa place ;
Dont la main est sans tache, et n’a connu jamais
Le fiel dont la satire envenime ses traits.