Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/109

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DAPHNIS.

Eh bien ! d’autres baisers en vont prendre la place.

NAÏS.

Adresse ailleurs ces vœux dont l’ardeur me poursuit :
Va, respecte une vierge.

DAPHNIS.

Ta jeunesse te flatte ; ah ! Imprudente bergère,
Ta jeunesse te flatte ; ah ! n’en sois point si fière :
Comme un songe insensible elle s’évanouit.

NAÏS.

Chaque âge a ses honneurs, et la saison dernière
Aux fleurs de l’oranger fait succéder son fruit.

DAPHNIS.

Viens sous ces oliviers ; j’ai beaucoup à te dire.

NAÏS.

Non ; déjà tes discours ont voulu me tenter

DAPHNIS.

Suis-moi sous ces ormeaux ; viens de grâce écouter
Les sons harmonieux que ma flûte respire :
J’ai fait pour toi des airs, je te les veux chanter ;
Déjà tout le vallon aime à les répéter.

NAÏS.

Va, tes airs langoureux ne sauraient me séduire.

DAPHNIS.

Eh quoi ! seule à Vénus penses-tu résister ?