Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/38

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Les néophytes répétaient les airs, dit-il, comme des oiseaux privés chantent pour attirer dans les rets de l’oiseleur les oiseaux sauvages. »

Le poète, pour compléter ses tableaux, aurait parlé prophétiquement de la découverte du Nouveau-Monde : « Ô Destins, hâtez-vous d’amener ce grand jour qui… qui… ; mais non. Destins, éloignez ce jour funeste, et, s’il se peut, qu’il n’arrive jamais !» Et il aurait flétri les horreurs qui suivirent la conquête. Il n’aurait pas moins présagé Gama et triomphé avec lui des périls amoncelés que lui opposa en vain

Des derniers Africains le cap noir des Tempêtes !

On a l’épilogue de l’Hermès presque achevé : toute la pensée philosophique d’André s’y exhale avec ferveur :

Ô mon fils, mon Hermès, ma plus belle espérance ;
Ô fruit des longs travaux de ma persévérance,
Toi l’objet le plus cher des veilles de dix ans,
Qui m’as coûté des soins et si doux et si lents ;
Confident de ma joie et remède à mes peines ;
Sur les lointaines mers, sur les terres lointaines,
Compagnon bien-aimé de mes pas incertains,
Ô mon fils, aujourd’hui quels seront tes destins ?
Une mère longtemps se cache ses alarmes ;
Elle-même à son fils veut attacher ses armes :
Mais quand il faut partir, ses bras, ses faibles bras
Ne peuvent sans terreur l’envoyer aux combats,
Dans la France, pour toi, que faut-il que j’espère ?
Jadis, enfant chéri, dans la maison d’un père
Qui te regardait naître et grandir sous ses yeux.
Tu pouvais sans péril, disciple curieux,