Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/47

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ceci n’est qu’une conjecture, mais que semble confirmer et justifier le canevas suivant, qui n’est autre que le sujet de Nina, transporté en Grèce, et où se retrouve jusqu’à l’écho des rimes de la romance :

« La jeune fille qu’on appelle la Belle de Scio… Son amant mourut… elle devint folle… Elle courait les montagnes (la peindre d’une manière antique). — (J’en pourrai, un jour, faire un tableau, un quadro)… et, longtemps après elle, on chantait cette chanson faite par elle dans sa folie :

Ne reviendra-t-il pas ? Il reviendra sans doute.
Non, il est sous la tombe : il attend, il écoute.
Va, Belle de Scio, meurs ! il te tend les bras ;
Va trouver ton amant : il ne reviendra pas ! »

Et, comme post-scriptum, il indique en anglais la chanson du quatrième acte d’Hamlet que chante Ophélia dans sa folie : avide et pure abeille, il se réserve de pétrir tout cela ensemble[1] !

Fidèle à l’antique, il ne l’était pas moins à la nature ; si, en imitant les anciens, il a l’air souvent d’avoir senti avant eux, souvent, lorsqu’il n’a l’air que

  1. André était comme La Fontaine, qui disait :

    J’en lis qui sont du Nord et qui sont du Midi.

    Il lisait tout. M Piscatori père, qui l’a connu avant la Révolution, m’a raconté qu’un jour particulièrement, il l’avait entendu causer avec feu et se développer sur Rabelais. Ce qu’il en disait a laissé dans l’esprit de M. Piscatori une impression singulière de nouveauté et d’éloquence. Cette étude qu’il avait faite de Rabelais me justifierait, s’il en était besoin, de l’avoir autrefois rapproché longuement de Régnier.