Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/107

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à fond ses écrits ; bien loin d’y trouver ce prétendu socialisme, ces tendances niveleuses qu’y voyait un comte de Beust, Louis II, lui, n’y découvrit qu’un idéal vraiment royal. Sans avoir encore jamais vu Wagner, il conçut une profonde, une ardente sympathie, une sympathie inébranlable, — l’avenir se chargea de le démontrer, — pour le poète de Lohengrin, comme pour le penseur de la Communication à mes amis. Ce n’est pas par suite d’un engouement irréfléchi pour lui, c’est parce qu’il avait reconnu sa haute signification que le roi Louis appela Wagner à Munich. Peut-être, d’ailleurs, ce prince fut-il le premier à se rendre nettement compte de ce qu’était Wagner et de ce qu’il voulait. « Ue moi il connaît et sait tout, et me comprend comme mon âme elle-même… Il est parfaitement instruit de ce que je suis et de ce qu’il me faut ; je n’ai pas eu à perdre une seule parole au sujet de ma position », écrit le maître en mai 1864.

Quant à Liszt, le seul à cette époque auquel on pourrait peut-être penser au même point de vue, il s’en faut de beaucoup qu’il pût se faire, du véritable but de Wagner, une idée aussi claire et aussi sympathiquement comprôhensive. Liszt était lui-même un si grand artiste qu’une seule œuvre de Wagner suffit à lui révéler la haute signification artistique de ce dernier ; mais comme, nulle part, nous ne voyons Liszt entrer en discussion sur la doctrine de son grand ami en matière d’art, sur ses vues relatives à la situation faite à cet art dans la société moderne, sur ses idées d’une régénération possible, etc., on est fondé à en conclure qu’il n’avait pour elles que peu ou point de sympathie. Le maître lui-même l’affirme : « Liszt ne me comprend pas en ce qui concerne ma pensée, et ma manière d’agir lui est évidemment contraire ». L’affection et la fidélité