Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chant. Du chant, du chant, et encore du chant, Allemands que vous êtes ! »

Que ses fonctions de directeur dussent bientôt être à charge à Wagner, lui devenir même insupportables, c’est là ce que chacun comprendra. « L’esprit qui présidait à nos représentations d’opéra me remplissait de dégoût.. ; tandis que je dirigeais l’exécution musicale de nos opéras, une tristesse rongeante m’étreignait le cœur, » dit-il de ce séjour à Riga. Il ne trouvait du courage que dans le déploiement de son activité créatrice, qui, dans son expansion graduelle et sûre, lui laissait, à travers les brumes maussades du présent, entrevoir les splendeurs naissantes de la glorieuse aurore à venir. À Riga, Wagner avait composé le poème de Rienzi, ainsi que la musique des deux premiers actes. Cette œuvre n’était pas faite pour une scène de province ; depuis longtemps Wagner était en correspondance avec Scribe, et bien que ces négociations ne pussent, naturellement, mener à rien, il n’en perdit pas courage. « Mes plans et moi avons la vie dure » écrit-il dans une lettre datée de Riga, « on ne nous tuera pas ». Sans mettre grand temps à se décider, il partit avec sa femme pour Paris, afin de forcer, pour une œuvre de lui, les portes du Grand-Opéra.

Cette période, un peu vagabonde, qui promena Wagner sur tant de scènes de province, ne resta pas sans fruit : en effet, il y acquit la pratique du théâtre, il apprit à connaître le monde théâtral allemand, il se rendit compte aussi de ce qui nuit au développement de l’art, comme de ce qui peut le rajeunir et le renouveler ; en un mot il vit, toucha, étudia à fond le matériel dont pouvait disposer un dramaturge et un compositeur allemand pour l’incarnation de sa pensée. Mieux encore, il prit contact avec les diverses parties de son