Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quand je cherche des hommes, je ne trouve que des fantoches de cette espèce ! » Ailleurs il demande à Liszt d’en finir une bonne fois avec « la coterie, cette alliance avec des sots, qui, à eux tous, sont incapables même de soupçonner de quoi il s’agit pour nous. » Même sur l’écrit de Brendel La musique d’aujourd’hui et l’art intégral de l’avenir, il s’exprime en ces termes : « Tout cela est bel et bon, et qui ne sait pas mieux faire peut faire comme eux ; mais quant à moi, je ne m’y reconnais plus. »

Il est cependant deux amis qui, à cette époque, c’est-à-dire vers 1850 et après, ont droit à une mention spéciale, parce que leurs dons supérieurs, comme la nature de leurs rapports avec le maître, les élevaient non seulement au-dessus de l’esprit de coterie, mais au-dessus même d’un simple lien de fidélité à un parti quelconque : ce sont Theodor Uhlig et Hans de Bülow. Le premier, d’abord violoniste à l’orchestre de Dresde, en devint plus tard le chef. Il est l’auteur de la partition pour piano de Lohengrin, et de remarquables articles, publiés dans divers journaux, sur les premiers écrits de Wagner à Zurich, sur les symphonies de Beethoven, etc. C’était un cerveau très fin, sans puissante originalité, mais d’une réceptivité telle qu’il s’assimilait entièrement ce qui lui venait du dehors, au point d’en faire quelque chose, sinon de nouveau, du moins de vraiment personnel. En plus, il possédait autant de sagacité critique que de tact artistique. Son caractère était à la hauteur de son intelligence ; il servit Wagner avec le désintéressement le plus absolu. Après sa mort précoce, survenue en janvier 1853, le maître écrivait à la veuve : « La perte de cet ami restera irréparable pour toute ma vie… ce m’est comme un veuvage ; à qui désormais confier tout ce pour quoi je