Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/263

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i)E CHAMFOKT. 'j.'S()

(iisparu de son palais éclipsé: elle attendait , de- puis quinze siècles, que le temps y ramenât des mœurs nouvelles, fécondesen tableaux, en images dignes d'arrêter ses regards ; elle attendait l'ins- tant, non de la barbarie, non de l'ignorance, mais l'instant qui leur succède, celui de l'erreur, de la crédule erreur, de l'illusion facile qui met entre ses mains le ressort du merveilleux , mo- bile sin^naturel de ses fictions embellies. Ce mo- ment est venu : les triomphes des clievaliers ont préparé les siens , leurs mains victorieuses ont de leurs lauriers tressé la couronne qui doit or- ner sa tète. A leur voix , accourent de l'orient les esprits invisibles, moteurs des cieux et des enfers, les fées , les génies désormais ses ministres ; ils accourent , et déposent à ses pieds les talismans divers , les attributs variés, emblèmes ingénieux de leur puissance soumise à la poésie, souveraine légitime des enchantemens et des prestiges. Elle règne : quelle foule d'images se presse, se suc- cède sous ses yeux ! Ces batailles où triomphent l'impétuosité, la force, le courage, plus que l'ordre et la discipline ; ces harangues de chefs ; ces femmes guerrières , ces dépouilles des vaincus , trophées de la victoire ; ces vœux terribles de l'a- mitié vengeresse de l'amitié; ces cadavres rendus aux larmes des parens, des amis ; ces armes des chevaliers fameux , objet , après leur mort , de dispute et de rivalité : tout vous rappelle Homère; et c'est la patrie de l'Arioste ^ du Tasse , c'est l'Ita-

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