Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/301

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DE CHA^irORT. S^y

cinquante ans de règne, vingt ans de succès et la constante idolâtrie de sa cour avaient exercé et en quelque sorte aguerri à soutenir les plus grands excès de la louange, une fois du moins s'avoua vaincu! et c'est à l'académie française qu'était ré- servé l'honneur de ce triomphe. Se flatterait-on que ce fut là le dernier terme d'un coupable avi- lissement? On se tromperait. Il faut voir, après la mort de Louiâ xiv, la servitude obstinée de cette compagnie punir , dans un de ses membres les plus distingués, le crime d'avoir osé juger, sur les principes de la justice et de la raison, la gloire de ce règne fastueux; il faut voir l'académie, pour venger ce prétendu outrage à la mémoire du roi, effacer de la liste académique le nom du seul écrivain patriote qu'elle y eût jamais placé , le respectable abbé de Saint-Pierre : lâcheté gratuite, qui semble n'avoir eu d'autre objet que de pro- tester d'avance contre les tentatives futmes ou pos- sibles de la liberté française, et de voter solen- nellement pour l'éternité de l'esclavage national. Je sais que le nouvel ordre de choses rend dé- sormais impossible de pareils scandales , et qu'il sauverait, même à l'académie , ime partie de ses ridicules accoutumés. On ne verrait plus l'avan- tage du rang tenir lieu de mérite , ni la fivear de la cour influer, du moins an même degré, sur les nominations. Non, ces abus et quelques autres ont disparu pour jamais ; mais ce qui restera , ce qui même est inévitable , c'est la perpétuité de l'es-

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